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New-York 1947

Il y a des chroniques plus facile à écrire que d’autres, celle-ci fait partie de la seconde catégorie, rarement un album m’aura laissé une impression si mitigée.
Il ne m’a pas déplu non, sinon je ne l’aurais pas chroniqué, mais il me laisse un goût d’inachevé, l’impression d’être passé à coté de quelque chose qui aurait pu être beaucoup plus percutant, beaucoup plus approfondi !
Néanmoins il a le mérite d’exister et de ne pas être franchement mauvais.

Quoiqu’il en soit je le déconseillerai à qui n’aurait pas lu Block 109 (voir ce billet) sous peine d’un rejet non mérité de l’ouvrage.
En effet, autant Etoile Rouge ou Opération Soleil de Plomb (voir ce billet) peuvent se lire seuls, autant New-York 1947 impose d’être imprégné du premier opus pour être apprécié à sa juste valeur.
Bien, ceci étant dit commençons à spoiler un peu et à exprimer mon ressenti (oui le mien, je le précise puisque je ne vais pas dire que des choses sympa).

Couverture New-York 1947
© Vincent Brugeas – Ronan Toulhoat – Akileos 2011

Un commando allemand est désigné pour aller récupérer le contenu d’un coffre à Manhattan. A ce niveau, on peut parler de mission suicide sachant que les membres du commando on été choisis pour leur aptitudes personnelles mais aussi pour leur aptitude à avoir déplu à quelqu’un de haut placé dans le Reich, un genre de « 12 salopards » version allemande, à ceci près qu’ils sont six et que Manhattan a servi de zone de test pour un virus expérimental nazi quelques mois auparavant.
Virus qui a fait muter les rares survivants de l’île, oui rares survivants, puisque le Reich un peu taquin, à lâché le feu nucléaire sur les États-Unis en mai 1945.

Ah oui.. petit aparté pour ceux qui ne connaîtraient pas Block 109, cette série est une uchronie, soit : partir de faits réels et tordre la réalité pour en créer une autre, telle qu’elle aurait pu, ou pas, se produire. Fin de l’aparté.

Voici donc nos six salopards en train de déambuler dans les rues d’un Manhattan dévasté qui n’est pas sans rappeler le sublime Prophet de Matthieu Lauffray, j’ose penser que ce n’est pas complètement involontaire et que c’est un clin d’oeil voulu.
D’un autre coté, dessiner New-York à moitié rasé et quasi désert ne peut qu’y faire penser, c’est certainement moi qui m’emballe, impatient que je suis de voir le 4ème tome de Prophet :)

Couverture New-York 1947
© Vincent Brugeas – Ronan Toulhoat – Akileos 2011

Revenons à nos moutons, le commando subit sa première perte, Der Journalist qui chute dans des circonstances mystérieuses, puis le groupe essuie très rapidement une première embuscade dans laquelle il perd le sac à dos de Der Spezialist; sac à dos qui contient un matériel essentiel à la réussite de sa mission.
Ici intervient pour moi la première incohérence du scénario : une rencontre providentielle et essentielle avec Alice/Rachel, un improbable chaperon rouge.
C’est bien connu, dans un monde urbain ruiné où chacun lutte pour sa survie, que chaque bloc de pierre peut cacher un ennemi, la tenue de combat furtive appropriée est un « poncho » rouge vif.
D’autant que durant tout l’album aucun des militaires chevronnés qui l’accompagne ne lui fera remarquer qu’elle peut mettre le groupe en péril avec cette tenue.
M’ouiiii… je suis dubitatif.
Par contre, j’y vois encore un clin d’œil, j’en suis friand et je finis par en voir partout, même là où il y en a pas… Cette silhouette rouge dans un univers monochrome, me fais penser à la Liste Schindler de Spielberg, association d’idées et d’univers sans doute…

continuons si vous le voulez bien, la demoiselle marchande la restitution du sac à dos contre l’exterminations des abominations qui colonisent la ville.
Le commando se lance à leur poursuite et arrive sur une position en surplomb des mutants. Der Ritter se lance dans un plan de bataille avec encerclement de l’ennemi en composant trois groupes de deux combattants; dont un groupe avec Rachel et Spitzel… Y’a que moi pour trouver ça débile ?
Vous composeriez un groupe avec les deux seules personnes capables de vous guider dans une ville inconnue vous ?
Ce mec doit être du genre à écrire son code secret au dos de sa carte bleue, un fin stratège assurément…

Le combat est engagé et tourne rapidement à l’avantage des agresseurs, qui sont armés et je le répète en hauteur par rapports à leurs cibles, nous y voyons Rachel armée d’un fusil mitrailleur en train de faire un carton sur les mutants avant d’égorger Spitzel… avec un poignard !?
Une rafale de fm n’aurait elle pas été plus efficace ?
Elle ne devait plus avoir de munitions, admettons…
À son retour, personne ne trouve étrange que la seule victime soit celui qui accompagne une ennemie potentielle, et ne va vérifier l’état du cadavre… passons aussi.

Mais dites moi, elle ne serait pas aussi débile que le Ritter cette petite Rachel ?
Après avoir égorgé Spitzel elle dit, s’adressant à son cadavre « Désolé mais je dois me tirer d’ici ».
Bien… alors pourquoi file-t’elle rejoindre le groupe plutôt que de se tirer !?
Je vous rappelle que ses compagnons sont morts et qu’elle est sensée guider des nazis qu’elle déteste pour accomplir une mission dont elle ignore tout, mais qui à coup sûr sert les intérêts du Reich, sinon ils n’enverrait pas un commando pour l’accomplir.
Encore une fois, y’a que moi pour trouver ça idiot ?
On en a tondues pour moins que ça…

Couverture New-York 1947
© Vincent Brugeas – Ronan Toulhoat – Akileos 2011

Bref, j’ai spoilé méchamment mais j’ai occulté bon nombre de petits détails pour vous permettre quand même une découverte sympathique de l’album, et je ne vais pas dévoiler le dénouement, même si une des scènes de la fin de mission, avant le retour me défrise un peu… je ne suis pas si cruel ;)
Par contre le dénouement est magistral, romantique, poignant et en même temps si futile et dérisoire (je parle ici du point de vue du héros, futile et dérisoire ne qualifie pas le scénario) .
Comme je l’ai déjà précisé, il ne sera perceptible qu’à un lecteur ayant lu Block 109.
Un « néo-lecteur » qui commencerait par New-York 1947, à coup sûr resterait sur sa faim et sa perception de la qualité de l’album serait biaisée, ce serait dommage.

Couverture New-York 1947
© Vincent Brugeas – Ronan Toulhoat – Akileos 2011

Comme les trois précédents opus, le dessin de Ronan Toulhoat est nerveux et rythmé, la qualité est au rendez-vous, il ne lui manque pas grand chose pour que je l’encense totalement.
Les quelques errements du scénario, le changement de narrateur en court d’ouvrage qui peut être perturbant (même si le changement de couleur de l’encart texte permet de s’y retrouver ), la fin légèrement précipitée me laissent légèrement sur ma faim. Une sensation de trop peu ou de trop confus peut-être.
Au-delà de ça, New-York 1947 reste un bon album doté d’une très belle couverture qui cumule les codes que j’aime (hep ! y’a pas aussi une référence à la planète des singes ? ok j’arrête…). il est aussi doté d’un petit carnet de croquis à la fin, j’adore ça !

Carnet de croquis New-York 1947
© Vincent Brugeas – Ronan Toulhoat – Akileos 2011

Les fans de la série l’apprécieront, et moi aussi malgré le ton du billet qui pourrait laisser penser l’inverse.
C’est pourquoi je suis impatient de voir sortir Ritter Germania (sortie prévue en avril 2012) si le cycle se confirme* ce devrait être une tuerie absolue !
me décevez pas les mecs ! :)

*Un cycle tout à fait perso : j’ai adoré le premier, pas apprécié du tout le deuxième, adoré le troisième, été un peu décu par le quatrième, donc…